Expulsion du preneur à bail commercial et clause résolutoire (impayés): Comment puis-je expulser mon preneur? Quel est le formalisme pour l’expulsion du preneur à bail commercial? Puis-je agir en référé ou seulement au fond? Quel est le tribunal compétent?Que faire en cas de procédure collective du preneur?
Dans l’hypothèse où le preneur à bail commercial ne paye plus son loyer (impayés), le bailleur pourra solliciter l’expulsion moyennant un processus particulier qui pourra varier en présence d’une procédure collective (ou être gelé).
Avant de prendre la décision d’expulsion de son preneur à bail commercial, le bailleur aura en tête la procédure et les éléments visés au tableau ci-dessous:
Comprendre l’expulsion dans le cadre d’un bail commercial
| Expulsion et clause résolutoire | – Le présent article a pour objet l’expulsion dans le cadre d’impayés visant un bail commercial (attention aux régimes dérogatoires pour les autres types de baux : bail professionnel, convention d’occupation, etc.) – Il faut se référer à la clause résolutoire insérée au contrat de bail commercial – Article L. 145-41 du Code de commerce : « Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. » |
| Distinction entre l’expulsion visant la clause résolutoire et l’action fondée sur l’article 1224 du Code civil (résiliation judiciaire) | Article 1224 du Code civil : « La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. ». Autrement dit, le bailleur peut poursuivre la résiliation du bail sur le fondement de l’article 1224 du Code civil pour loyers impayés. Le régime de cette action est différent de l’action visant la clause résolutoire (il faudra notamment que l’inexécution soit suffisamment grave) |
| Processus d’expulsion | – Commandement de payer visant la clause résolutoire (article L. 145-41, alinéa 1er du Code de commerce : » Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai « ) – Assignation au fond devant le tribunal judiciaire ou en référé devant le juge des référés ? Cela dépend des situations. S’il y a des contestations sérieuses, par exemple l’exception d’inexécution, l’action en référé ne sera pas opportune car le juge rejettera les demandes du bailleur. Les demandes du bailleur peuvent excéder les pouvoirs du juge des référés qui sont limités : le juge des référés peut par exemple condamner à une provision à valoir sur dommages intérêts mais pas à des dommages intérêts. Par ailleurs, le juge des référés ne peut pas résilier le bail commercial (sur le fondement de l’article 1224, hors clause résolutoire ou en cas de clause résolutoire mal rédigée). Cependant, le juge des référés peut constater la résiliation en application d’une clause résolutoire. Il faut que cette clause soit suffisamment claire. – Article L. 143-2 du Code de commerce : « Le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l’immeuble dans lequel s’exploite un fonds de commerce grevé d’inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élu par eux dans leurs inscriptions. Le jugement ne peut intervenir qu’après un mois écoulé depuis la notification. La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu’un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus. Si le bail est notarié, il peut être intéressant de faire une saisie des comptes bancaires du preneur ». Autrement dit, l’assignation est dénoncée aux créanciers par commissaire de justice |
| Tribunal compétent | – Article R. 211-4, I, 2° du Code de l’organisation judiciaire : « I. − En matière civile, les tribunaux judiciaires spécialement désignés sur le fondement de l’article L. 211-9-3 connaissent seuls, dans l’ensemble des ressorts des tribunaux judiciaires d’un même département ou, dans les conditions prévues au III de l’article L. 211-9-3, dans deux départements, de l’une ou plusieurs des compétences suivantes : (…) 2° Des actions relatives aux baux commerciaux fondées sur les articles L. 145-1 à L. 145-60 du code de commerce ; ». Par conséquent, l’action en acquisition de la clause résolutoire fondée sur l’article L. 145-41 du Code de commerce relève de la compétence exclusive du tribunal judiciaire. – Article R. 145-23, alinéa 3 du Code de commerce : « la juridiction territorialement compétente est celle du lieu de la situation de l’immeuble ». |
| Procédures collectives | – Attention à la compétence du juge-commissaire pour constater la résiliation de plein droit du bail commercial – Article L. 622-21 du Code de commerce : « I.-Le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L. 622-17 et tendant : 1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ; 2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent. » – S’il existe d’autres motifs d’acquisition de la clause résolutoire (autre que le paiement du loyer), il peut être opportun de se fonder sur ces autres motifs pour « contourner » cet arrêt des poursuites |
| Indemnité d’éviction | A partir du moment où la clause résolutoire est acquise (en cas de prévision contractuelle par exemple : acquisition de la clause résolutoire un mois après mise en demeure), le preneur doit payer une indemnité d’occupation (fixée en principe selon les prévisions du bail) |
| Conseils et points d’attention | – Bail notarié : si le bail commercial a été rédigé par acte authentique (par notaire), alors le bailleur pourra directement diligenter une saisie du compte bancaire car le bail constitue alors un titre exécutoire. Cependant, la rédaction authentique ne permet pas de passer outre la procédure de commandement visant la clause résolutoire et la phase assignation. – En cas de cession de fonds de commerce, le bailleur a un levier conséquent puisque le cessionnaire du fonds de commerce n’aura aucun intérêt à acquérir un fonds sachant qu’une procédure visant la clause résolutoire est engagée (il sera responsable des actes du précédent preneur). Il est généralement opportun d’opter pour un règlement amiable global (avec le preneur en place et le futur cessionnaire) – A la sortie du preneur, il ne faudra pas omettre de faire dresser un état des lieux par voie de commissaire de justice pour la preuve des éventuelles dégradations |